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Pasnic à travers les expositions

2023

Première foire depuis de nombreuses années, nous serions ravies de vous retrouver à la Paris Print Fair au réfectoire du Couvent des Cordeliers -

15 rue de l'école de Médecine 75006 Paris

Du 22 au 26 mars 2023

Vernissage le 22 mars

2022

Passionnément Pasnic

Galerie Beaurepaire - 28 rue Beaurepaire 75010 Paris -

du 05 au 10 juillet 2022

Vernissage le 06 Juillet

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2019

2019

Pièces uniques pour cadeaux uniques.

 

Galerie en atelier AROA

du 13 au 21 décembre 2019

2017

2017

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DÉJEUNER EN L'AIR - Carte blanche à l'Atelier Pasnic

 

sur une proposition d'Aude Ambroggi à The Big Gallery - 27 rue Saint Paul, Paris 4ème 

du 1er au 30 décembre 2017

Remerciements à tous les convives de ce déjeuner :

les artistes pour avoir relevé le défi

Pascal Aubier pour avoir le sel de son texte

Nicolas du Mesnil du Buisson pour sa bonne humeur

Géronimo Roussopoulos pour sa fidélité

Hervé Tartarin pour ses belles images

L'œil de la femme à barbe pour sa réactivité

la famille d'Aude Ambroggi pour son soutien

Tous droit réservés aux artistes, à The Big Gallery et à l'Atelier Pasnic

         Ce n’est pas une mince affaire cette affaire de déjeuner qui me tombe d’un coup. Une invitation à déjeuner n’est pas non plus une affaire de minceur. Mais déjeuner en l’air, c’est où ça, en l’air ? Comment s’y rend-on ?

       Je me suis laissé dire qu’à l’origine, Aude Ambroggi qui est peintre et insulaire aurait décidé de réunir un certain nombre d’artistes pour les exposer ensemble dans sa vaste « Big Gallery » du Marais, à Paris. Bon, mais ça ne dit pas tout.

        Après ça la rumeur a prétendu que le « déjeuner en l’air » a été tiré au sort dans un atelier du XXème arrondissement. Tiré au sort ? Non, non, pas tiré au sort s’est-on empressé de corriger, trouvé. Je ne sais ni comment, ni où dans l’atelier ils ont trouvé ce déjeuner aérien.

 

         J’y suis allé, j’ai vu les œuvres des artistes réunies, je les ai regardées, admirées et même aimées mais le mystère reste pour moi entier. Même si les dessins semblent aériens. L’air de l’atelier sent la colle et l’encre et quelques bouffées de sent bon émanent des dames  qui s’y activent. Il était près de midi, on m’a dit qu’on allait déjeuner. Mais on a déjeuné « chez Papa », dans la rue d’à côté. Je n’ai rien osé demander pour ne pas avoir l’air d’un con. On a toujours peur d’avoir l’air con. Mais Nicolas du Mesnil, le grand graveur qui officie comme un cuisinier devant ses dominos,  me certifie qu’au contraire, il ne faut pas oublier d’en avoir l’air, surtout pour déjeuner en l’air… J’ai levé les yeux au ciel et n’ai vu que les écailles de peinture glauque au plafond.

 

        Qu’est-ce que c’est que ce truc ? D’abord Pasnic, un drôle de nom déjà, non ? PASNIC. Maison fondée en 1978 par Pascal Gauvard et Nicolas du Mesnil du Buisson, d’après le Grand Dictionnaire Ethique de l’Art Gravé . Et Pasnic, m’explique-t-on est un jeu de mots sur les prénoms des fondateurs. À bon entendeur salut. Cet atelier est spécialisé dans la technique du carborundum et autres techniques expérimentales. On m’a tout expliqué, c’est très intéressant, si, si. Beaucoup d’artistes fréquentent. C’est d’eux qu’il va s’agir ici. Ils vont déjeuner en l’air. Pour ce que ça veut dire… On m’a demandé d’expliquer, de dire. De voir et de regarder.

 

          Alors, allons-y. Voici les artistes choisis, ce ne sont pas des moindres : Sophie Sainrapt,François Jauvion, Mylène Kolé, Mark Brusse, Antonio Ségui, Monique Tello, Gildas le Reste, Augusto Foldi , Aude Ambroggi, Michel Hass et Jean-Paul Chambas dans l’ordre où j’ai regardé leurs œuvres singulières.

 

           Je dois commencer par parler de Sophie Sainrapt, c’est effectivement son travail sur ce déjeuner que j’ai vu en premier. C’est aussi par elle que j’ai connu Pasnic et le singulier travail qui s’y fait. Et que j’ai connu Monsieur Nicolas du Blanc Mesnil du Buisson et de la Forêt Vierge Marie auquel elle voue grande tendresse et amitié. Ainsi sont les filles. Et elle est gourmande. Et c’est avec gourmandise qu’elle a gravé son déjeuner prévu en l’air.

         Quelques fruits bousculés à coup de poing et de pied et quelques créatures sans les quelles on ne saurait pique-niquer. Créatures qui sortent, surgissent des plats mêmes qui vont être servis. Sophie Sainrapt aime peindre les femmes sans habits, rondes et  luisantes, de dos, de fesses, de face, très en face. Elles sont à croquer. On a envie d’en avoir chez soi, aux murs, par terre, dans la salle de bain, sous le lit, dans des cartons et à table, bien entendu. Ses femmes en pot semblent attendre un Rodin ou peut-être même un Manet. Moi j’attends Sophie au tournant.

 

          François Jauvion est un bon jeune homme qui colore et recolore ses dessins, mangeurs mangés. De la joie, de l’humour, de l’histoire. De la peur, un peu aussi. Sans peur peu d’art, peu d’humour ni de joie. Pas d’histoire. Quand, comme moi on aime les bandes dessinées on exulte à regarder son travail. Ses couleurs, loin des bandes, foisonnent comme les herbes des champs fleuris. Ce sera en l’air, un déjeuner de fête, jeune et vif. Je l’entends rire.

 

           Mylène Kolé est blonde comme l’été, son sourire semble tenir son crayon. Elle s’envole, vole en colibri. J’ai vu de l’autre côté du monde ses oiseaux minuscules qui plongent leurs bec dans les corrolles, les ailes frétillantes pour se tenir sur place. Les hélicoptères à côté d’eux ont l’air de cons mais comme le dit Nicolas, c’est bien comme ça aussi. Ses oiseaux lui font une chaise, elle sera bien installée pour le repas. Elle peint légère, la légèreté grâcieuse, elle peint la vie revenue. Le Bonheur, un truc si difficile à saisir.

 

          Mark Brusse, rend d’abord hommage à Pasnic, passeur de liberté sans relâche. Il est le premier qui se réclame de Manet dont le déjeuner sur l’herbe a fait florès, il se réclame surtout d’Alain Jacquet. Qu’il a été interprété, revu et pastiché comme tant de monde, Picasso en tête et Jacquet dans la foulée donc. Double bande. Alice a rencontré Brusse en son merveilleux pays avec ses tasses dans les nuages, en l’air, en l’air… Rien n’est convenu. On est léger. Leger comme l’air. Est-ce ça la clé ?

            Monique Tello est de toute façon aérienne. C’est sa nature, c’est son fond. Son regard Poitevin, vieux comme cette partie du monde, couvre de frises et de couleurs légères son paysage mystérieux. Elle vient du pays des fées, des sorcières, des vouivres. Les catholiques ont recouverts leurs rituels de leurs propres dogmes, comme ils le font d’habitude mais sous le roman et le gothique, les elfes courent toujours. Monique Tello est brune Sarrasine comme on disait dans mon enfance quand j’allais à la classe par là. Les Arabes avaient été vaincus à Poitiers mais ils avaient pris le temps d’en « aimer plus d’une ». Les belles qui nous restent sont cadeau. Monique Tello est un cadeau. Elle fait des meubles, des frises, des peintures qui volent le vent au vent. Et les gravures que vous avez sous vos yeux…

            Antonio Ségui est un des piliers de Pasnic. On le voit partout sur ses murs, joyeux, tendre, aigu. L’Amérique Latine chante et fait danser, elle est à la fois fidèle et révoltée. Les révolutions survolent les Andes et les Océans. Les Etatsunisiens s’y sont cassé le nez et c’est bien fait, ils n’ont eu que ce qu’ils méritaient. Même si le continent sait engendrer ses propres prédateurs de libertés, les artistes là bas sont ceux qui nous en débarrasseront. Et les enfants joueront avec les oiseaux. Bravo. Les mets de Ségui volent au dessus de sa tête éternellement chapeautée ? Cela a l’air fameux.

           Gildas le Reste est le voisin de palier, déjà un peu en altitude. Il grave ses paniers, les remplit de choses, une dame le guette, il a l’air de se faufiler. Traits noirs, accrochés, un peu de bleu comme un clin d’œil au ciel. Les paniers sont-ils en osier ? On dirait bien. Gildas est un artiste délicat. Il aime lui aussi la joie de l'agape et des cépages rares mais il prétend rester « terre à terre", les maux de mer et les trous d'air le retiennent à la passion des vaches et surtout à leur plancher.

              Il assure que Maître Manet nous fait de l'oeil et nous invite à ce déjeuner par ricochet, le sien, il s’en souvient, il y était, fit la une au salon des refusés et non au salon d'heureuses fusées !

             Augusto – Tour Eiffel - Foldi est une danseuse. Une danseuse qui peint comme elle danse. C’est d’ailleurs très joli et l’on ne doit pas penser joli comme un diminutif de beau. En l’occurrence ce serait ici le contraire. Ce peintre au pied léger compte bien aller déjeuner dans les nuages. Mais il est prévoyant et recommande Le Panier de Prospérus. Jamais entendu parler de ce type d’ustensile. La Tour m’explique qu’il y apparaît d'abord le Phénix. Puis les épices et les oiseaux de plein ciel suivis des poissons. Il n’y a qu’à regarder ses dessins, cela a l’air assez clair. Il tient qu’on accompagne ces mets de vin de frênette, et de brochet au miel pour la tarte bourbonnaise et de petits palets au cerfeuil. Puis qu’on s'allonge pour écouter les vents messagers. Danseuse, peintre, antique et poète au goût très fin, son travail de gravure enchante et invite au plaisir.

 

             À peine plus loin, Aude Ambroggi elle même, enfin. Toute aussi en appétit. Toute aussi gourmande, décidément. Et très culottée car elle mélange invités et cuisine, noirs, blanc et couleurs, tête en bas, tête en l’air, en ribambelle. On se régale rien que de regarder. Et dans sa cuisine il y a du soleil et des rires. On a envie de s’asseoir et d’écouter autant qu’on regarde. Une casserole est sur le feu, géométrie dans l’espace petite pulsion de couleurs. Un enfant sort des flammes, la tête à l’envers, quelqu’un tire la langue, la musique est partout. Comme les acteurs. La dame ne hait point les acteurs et semble aimer la vie plus que tout. Vie, bruit, rires. Magie. Il y a un monde fou et ce monde est fou lui aussi, fou de joie. Et plein de pâtes, de poulettes rôties, de vin du Cap, la forêt est citadine, cloches tintinnabulantes et courses dans les bosquets. Avec culotte pour certaines, les fées un peu effrayées. Mais c’est la fête. Points de suspension… Merci signora.

              Michel Haas est rentré par le sud. Il se glisse derrière les papiers des affiches, il crée des ombres familières, mano a mano avec le noir sur le blanc grumeleux. Et les animaux qui passent, qui paissent, qui courent, qui dorment, et les amoureux. Il a invité quelqu’un à nous rejoindre en l’air, quelqu’un qui monte, qui monte, qui sortira du cadre si on ne l’arrête. Un chien-chat, amical et tendre. Ou sauvage ? On peut lui faire confiance, ce sera un bon convive et s’il rit comme Michel Haas, on n’a pas fini la joie.

             J’entends Jean-Paul Chambas qui monte les escaliers, la porte grince un peu mais il a l’air content. Il a pris son temps mais le temps se laisse prendre. Chambas est Gascon, il a très bon caractère et les Gascons respectent la table, il sort ses papiers : on y découvre qu’une foule d’amis déjà sont installés pour déjeuner. En bas, des passants se sont arrêtés et regardent en l’air ceux qui sont installés, le verre à la main. Chambas est un peintre de la fête, encore, un peintre des hommes et des femmes, des amis. On sent la connivence et l’élégance indispensable. Tout y est. L’herbe, le vin, les belles. C’est tellement important, les belles. Et les escarpins. Et le vin… Et la peinture qu’on arrache.

               Chambas vient de découvrir le carborendum à la Pasnic. Il prend vite le dessus. Ses traits semblent asperger le papier. La couleur qui généralement foisonne dans ses œuvres est là en pleine absence. Tout y est bien. Finement. Etat de grâce.

             Oblique, horizontale, verticale, quelle ascension ! Mieux valent les garçons et les filles, dans les nuages gazon, qu’au métro, boulot, McDo, dodo…  C’est bien d’être là dans le pur de l’air vers midi. Toutes ces gravures chatoient toutes ensemble. Elles nous envoient bel et bien en l’air, comme on aime. On comprend Manet l’inspirateur si souvent aspiré, revu, corrigé, réinventé, rebidouillé à toutes les sauces et dans toutes les couleurs. C’était pourtant simple, deux types habillés, assis dans l’herbe autour d’un pique-nique en compagnie d’une femme toute nue. Tous les phantasmes sont là. L’habit de l’homme, le corps nu de la femme. Il ne manquait qu’un peu d’air, nous en avons, nous y sommes messieurs dames, on peut s’arrêter. Et regarder.

Pascal Aubier

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